Suivre la piste du cacao et du chocolat à Madagascar : La vallée du fleuve Sambirano

Publié le : 15 août 20236.1 min lire
La deuxième partie de notre voyage à Madagascar nous a conduits à Ambanja et dans la vallée du Sambirano, dans le nord-ouest de la plus ancienne île du monde.  Le Conseil National Cacao de Madagascar (CNC) a gentiment organisé une visite d'une journée pour les membres du Panel Ad Hoc de l'ICCO, qui ont choisi de rester après la réunion. Première étape : la station de fermentation centralisée de la Koperativa Sambirano Manongalaza (KOSAMA). Cette petite coopérative a fièrement présenté son centre de fermentation où la masse humide collectée auprès de ses membres est fermentée dans un système de caisses en bois superposées, et séchée sur des patios.

Casser les cabosses sur le site de fermentation centra de la coopérative KOSAMA

Le CNC soutient les agriculteurs par le biais de de formations et encourage la culture du cacao dans le cadre d'un programme agroforestier afin de rendre leurs exploitations plus résistantes aux effets du changement climatique et de préserver la biodiversité menacée de l'île.  Une partie importante de ces efforts a été présentée dans la pépinière et le jardin de germoplasmes, qui sont gérés par le CNC à Ambanja. Les variétés sont développées et distribuées aux petits agriculteurs. Notre dernière étape nous a conduits au Centre d'évaluation du cacao et aux bureaux administratifs du CNC. Des contrôles de qualité sont effectués par JLB Expertises sur des échantillons représentatifs de chaque lot de cacao exporté de Madagascar. Même si l'analyse réalisée en ce moment n'est que physique, il est prévu d'effectuer bientôt des évaluations sensorielles des échantillons.

Deux dames fières de réaliser les contrôles de qualité sur des centaines d'échantillons.

  MILLOT : UNE PLANTATION HISTORIQUE  Notre point d'ancrage lors de notre voyage à Ambanja était la plantation historique Millot, où nous avons passé nos nuits dans leur propre B&B : Maison du Planteur.

Repèrez mon petit roommate : la biodiversité riche de l'île se trouve partout !

  M. Bruno Dunoyer, directeur de la plantation de 1500 hectares, a enrichi nos journées et nos nuits avec des faits intéressants et de belles histoires sur le cacao. Le soir, elles étaient accompagnées  de plats délicieux, préparés dans leur cuisine avec des ingrédients locaux.

La vaste expertise de Bruno, son charisme, son expérience et son sens de l'humour ont apporté une dimension supplémentaire à nos visites.

Lucien Millot, originaire de Nantua dans l'est de la France, a immigré à Madagascar en 1901. Il a initié une plantation où il récoltait du café, des cocotiers, du manioc, du poivre et de la vanille. Il distillait aussi de la citronnelle et de l'ylang-ylang. En 1920, il a introduit dans la plantation des cacaoyers provenant du jardin botanique de Buitenzorg à Java. Pendant plus d'un siècle, la plantation Millot a fourni du cacao aux grands talents du chocolat en Europe. Aujourd'hui, elle produit du cacao exclusivement pour la gamme de chocolat Majari de Valrhona.

Terrasse et tables de séchage dans l'installation de post-récolte à Millot

  Millot emploie plus de 800 personnes, dont la majorité sont des femmes. La plantation soutient également l'école du village, fréquentée par la plupart des enfants des employés. Un bus aménagé servira bientôt de garderie pour accueillir les bébés et les petits enfants des mamans au travail. ÅKESSON ORGANIC : LE PATRIMOINE DU CACAO  Nous nous réveillons par une autre belle matinée ensoleillée à Ambanja et nous nous rendons à la plantation de Bertil Åkesson.

Des sourires radieux par une matinée ensoleillée : deux femmes s'occupent du séchage du cacao.

  La propriété d'origine de Millot a été divisée en parcelles. L'une de ces parcelles a été achetée dans les années 70 par un commerçant suédois et ancien diplomate du nom de Carl Gustaf Bertil Åkesson.  Aujourd'hui, Bertil est le fier détenteur du patrimoine cacaoyer de son père et il produit du cacao fin dans la plantation biologique d'Åkesson (anciennement connue sous le nom de Sagit). La plantation s'étend sur 5 300 hectares.  De la vanille, du café et du poivre sont également cultivés aux côtés le cacao. L'ylang-ylang, le vétiver et d'autres plantes aromatiques sont aussi cultivés par AO. Les plantes et les fleurs sont distillées sur leur propriété et exportées vers l'industrie mondiale du parfum.

Les arbres d'ylang-ylang sur l'une des nombreuses propriétés d'AO le long de la vallée

Des femmes préparant les plantes aromatiques pour la distillation

LA FERME OTTANGE DE MAVA : FIERTÉ MALGACHE  Cette dernière étape de notre voyage cacaoyer a été une expérience particulièrement spéciale pour moi. En 2017, j'ai rencontré le directeur de MAVA S.A., Thomas Wenisch, à Amsterdam. Il faisait la promotion du cacao produit dans les fermes de MAVA. Nous les  avons tous goûté, l'un après l'autre. Toutes  les saveurs étaient très distinctes, très différentes du profil "classique" que nous connaissions et aimions tous. C'est à ce moment-là que j'ai su que nous devions partager ce cacao avec le reste du monde afin de promouvoir la diversité des saveurs de l'île. Depuis lors, nous sommes fiers de collaborer avec MAVA.

Un rêve de 6 ans en devenir ! De gauche à droite : Thomas Wenisch, ancien directeur de MAVA S.A., les experts du panel ad hoc de l'ICCO Nubia Martínex, Julien Simonis, Hery Ralaimiza, directeur actuel de MAVA S.A., moi (comblé) et Adriana Arciniegas, aussi membre du panel.

  La ferme Ottange est l'une des 8 réparties sur 635 hectares de terres détenues et exploitées par MAVA S.A. depuis 2015. Cette ancienne propriété de l'État appartient en partie à Chocolat Madagascar, une entreprise entièrement malgache de la famille Ramanandraibe. En tant que propriétaire de la Chocolaterie Robert, la famille contribue depuis des décennies au redressement économique et industriel de Madagascar. Cela les a amené à lutter vigoureusement contre d'autres parties pour acquérir ces terres. Chocolat Madagascar est convaincu qu'en augmentant leur production de chocolat de classe mondiale, ils peuvent continuer à soutenir la création de nouveaux emplois et des opportunités pour leurs communautés locales. La ferme Ottange est la plus petite des 8 fermes et elle est nichée le long des rives de la rivière Ramena. Tous les cacaoyers y sont cultivés biologiquement dans un système agroforestier traditionnel. Le volume de production annuel de la ferme est d'environ 6 tonnes, dont une grande partie est utilisée par Chocolat Madagascar pour leurs tablettes de chocolat provenant de la plantation. Une coopérative et 3 des plus grands exportateurs de cacao fin de Madagascar partagent le même objectif et font fâce aux mêmes défis. Ils veulent continuer à promouvoir les saveurs et la diversité du cacao malgache. Cependant, ils sont également confrontés aux menaces bien réelles posées par le changement climatique.  Les plans du CNC visant à étendre la production de cacao sur l'île à 25 000 tonnes métriques d'ici 2025 pourraient être confrontés au défi de la migration due au changement climatique. La partie sud de Madagascar connaissant une sécheresse prolongée, un afflux de migrants en provenance du sud mettrait sous pression les terres cultivables du nord.  Ce que l'avenir nous réserve est encore incertain, mais une certitude demeure : Madagascar est fière de ses racines cacaoyères et s'engage à continuer à produire du cacao fin à qualité supérieure pour le monde entier.

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